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Comment bien apprendre avec les neurosciences, pilier 4

consolidation des apprentissages

Connaissez-vous le mythe de l’apprentissage en dormant ? À la fin d’une séance d’anglais, Samuel vient me voir pour échanger sur les meilleures façons de progresser dans la matière. Pour le moment, ce qu’il a mis en place, est un audio en anglais qu’il laisse tourner pendant sa nuit de sommeil. Ainsi, pense-t-il pouvoir apprendre la langue de Shakespeare inconsciemment. Même si cette approche m’apparait fort douteuse, Samuel n’a pas totalement tort de croire que le sommeil a un rôle clé dans son apprentissage. Nous allons voir comment la consolidation, le pilier numéro 4 de S.Dehaene, se déploie dans l’apprentissage.

La consolidation demande des efforts

Prenons l’exemple de Samuel en anglais. Ce dernier deviendra de plus en plus fluide avec la pratique. Plus il s’entraînera à lire, écrire, comprendre, plus ses apprentissages s’automatiseront. Cela demande des efforts d’apprentissage et de passer par les piliers traités dans les articles précédents à savoir l’attention, l’engagement et le retour sur erreur.

Ainsi pour Stanislas Dehaene la consolidation passe d’un traitement lent, conscient, avec effort à un fonctionnement rapide, inconscient et automatique. Une fois une compétence acquise, il y a une compilation de ce qui est devenu routine dans une autre région du cerveau pour qu’elle se déroule inconsciemment, en toute autonomie, sans perturber les autres opérations en cours.

Notre cerveau libère les ressources cérébrales

L’apprentissage d’une compétence, lorsqu’il commence, demande beaucoup d’énergie car plusieurs zones de notre cerveau sont activées. Dans l’exemple d’une langue, il y a la reconnaissance des lettres, le traitement des phonèmes, des syllabes, des mots, l’activation de régions spécifiques à l’effort, l’attention spatiale ainsi que les stratégies conscientes. Cette intensité va disparaître au fur et à mesure que l’apprentissage se consolide.

Je me souviens de ma toute première expérience en Angleterre ; il m’a fallu environ 3 semaines de concentration intense et de dolipranes pour parvenir à comprendre et échanger avec un natif sans effort. Comme j’y suis restée deux années consécutives, que je pratiquais la langue quotidiennement sous toutes ses formes, (compréhension écrite, orale, production écrite et orale) cette compétence s’est ‘routinisée’ pour reprendre les termes de S. Dehaene. Mon cerveau a ‘mis en place un circuit restreint et spécialisé pour le traitement efficace’ de l’information que je rencontrais régulièrement.

Après quelques années de ‘surapprentissage’ notre cerveau passe l’information en mode de routine et s’automatise inconsciemment. La routinisation semble donc importante puisqu’elle permet de rendre les ressources du cerveau disponibles pour d’autres objectifs.

Et le sommeil dans tout cela ?

Les neurosciences, avec plus précisément deux psychologues américains (John Jenkins et Karl Dallenbach), ont découvert en 1924, que ‘toutes les nuits, notre cerveau consolide ce qu’il a appris pendant la journée. Tandis que nous dormons notre cerveau se répète les évènements importants qu’il a enregistrés pendant la veille et, progressivement, il les transfère dans un compartiment plus efficace de notre mémoire.’ En s’appuyant sur une expérience réalisée auprès d’étudiants, ils observent que l’apprentissage du matin s’effondre avec le temps (cf courbe de l’oubli de H. Ebbinghaus) et que l’apprentissage de minuit reste stable dans le temps à condition d’avoir bénéficié d’au moins deux heures de sommeil.

De nombreux travaux viendront confirmer cette découverte du sommeil qui cause le surcroît d’apprentissage. La quantité d’apprentissage varie directement en fonction de la durée du sommeil et surtout de sa profondeur. Ainsi, selon Dehaene et d’autres neuroscientifiques, ‘le sommeil joue un rôle important dans la consolidation des apprentissages.

Lorsqu’un rat s’endort, les neurones de l’hippocampe rejouent, souvent à vitesse accélérée, les séquences d’activité qu’il a vécues lorsqu’il était éveillé. Cette activité qui s’étend au cortex, se répète des centaines de fois pendant la nuit. Au réveil, les apprentissages des jours précédents sont mieux consolidés et automatisés. Notre cerveau peut même découvrir, pendant notre sommeil, des régularités qui nous avaient échappé pendant la veille.’ Après avoir dormi, l’activité cérébrale se déplace : une partie des connaissances acquises dans la journée est transférée vers des circuits plus automatiques et plus spécialisés.

Le mot de la fin pour Samuel

Pour conclure acheter des enregistrements audios pour apprendre une langue étrangère pendant la nuit n’a aucun effet. Hé oui Samuel, pour apprendre, quelle que soit la compétence, cela passe par l’effort, la répétition en état de veille et par une bonne dose de sommeil pour réactiver et consolider ce que tu as appris.

 ‘Le cerveau endormi n’apprend pratiquement rien. Il ne peut que rejouer ce qu’il a déjà éprouvé.’ (S.Dehaene)

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